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Infobésité contre créativité avec Chris Lewis [ Too Fast To Think ]

Too Fast To Think Chris Lewis: InfobésitéL’ infobésité nous cerne de partout et c’est un coup sérieux porté à notre créativité. Ainsi pourrions-nous résumer le dernier livre de Chris Lewis. Chris est un ancien journaliste britannique, fondateur et PDG d’une des plus grandes agences de communication indépendantes (Lewis emploie 700 personnes dans 27 pays). J‘ai interviewé Chris sur Skype il y a quelques semaines et nous avons évoqué ensemble l’ infobésité, notre quête d’informations, notre capacité – ou incapacité – à l’analyser et à innover. Dans cette vidéo très inspirante, et dans son livre, j’ai trouvé matière à tirer nombre de leçons utiles pour nos lecteurs et potentiellement pour le management de nos équipiers multitâches. En premier lieu, vous apprendrez que penser trop vite pourrait bien être une très mauvaise idée.

Infobésité contre créativité avec Chris Lewis [Too Fast To Think]

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Certains d’entre nous ne seraient-ils pas plus distraits que d’autres quand ils tweetent ? Et cela n’aurait-il pas d’impact sur notre façon de penser ? (dessin de Chapatte)

Le monde pense trop vite, mais pas moi

On ne pourra pas m’accuser de penser trop vite, Chris sera bien forcé de le reconnaître. Je l’ai interviewé le 19 janvier 2017 et cela m’a pris trois semaines pour monter son interview et quelques heures de plus pour écrire ce billet.

Et cela sans tenir compte du fait qu’il nous a fallu deux bons mois pour synchroniser nos agendas. Cette remarque n’est pas fortuite. J’ai beaucoup aimé sa remarque sur ce qu’il a appelé « l’illusion de la vitesse ». Nous sommes plongés dans un monde où la communication n’a jamais été aussi aisée ni rapide, mais cela nous donne seulement une illusion de communication et de vitesse. Voilà qui nous ramène à ce que je disais de l’organisation de cette interview.

Alors, nous nous réfugions derrière nos téléphones et nos écrans, mais que reste-t-il de notre capacité à converser et à vivre en société ? (À ce sujet, voir la vidéo de Simon Sinek dédiée aux nouvelles générations, mais qui s’adresse à nous tous).

infobésité

Les outils devraient être nos esclaves et l’infobésité nous empêche de penser

« Les outils devraient être nos esclaves, nous ne devrions pas être les leurs » (cette citation tirée de l’interview de Chris devrait être envoyée à tous mes étudiants et sans aucun doute elle le sera).

Mon interview vidéo avec Chris Lewis, PDG (Oh, pardon ! « Grand Enchilada ») de Lewis

Au cœur de la réflexion de Chris Lewis il y a le fait que l’ infobésité nous cerne de partout. Un flot interminable de flux RSS, de titres de journaux, de nouvelles sensationnelles dont lui-même reconnaît être devenu un esclave. En cherchant de mauvais exemples de comportements en termes de consommation d’information Il reconnaît lui-même en être la quintessence (« regardez moi » m’a-t-il dit avec malice). Il avoue être un « news junkie » et un bourreau de travail. Ainsi, Il est bien placé pour décrire les maux qui nous touchent et notre incapacité à analyser, et comme il le dit justement, « à rassembler les pièces du puzzle ».

La surcharge d’information, a-t-il continué, signifie que nous sommes sans arrêt en éveil, et en conséquence, que notre « capacité à produire des idées et à conceptualiser est en baisse ». « Cette infobésité et cette surcharge d’informations finit par éroder notre capacité innée et fondamentale à résoudre les problèmes » complète-t-il.

voilà qui n’est pas de très bon augure, alors comment réagir ?

Comment rester maître de l’ infobésité et lui survivre

Chris a remarqué en interviewant des penseurs, des politiciens, des artistes, des journalistes et même des membres du clergé, que quand il leur demandait comment ils généraient de nouvelles idées, ceux-ci expliquaient toujours les choses de la même manière : il fallait qu’ils soient seuls, au calme et certainement qu’ils arrêtent de faire plusieurs tâches à la fois. Faire une chose à la fois et prendre du recul étaient clé dans leur manière d’innover. En procédant ainsi, on peut véritablement générer des idées qui peuvent changer le monde. Le multitâche, au contraire vous bloque dans une impasse.

Même au XXIe siècle. Même en ces temps de révolution digitale. Et même encore plus à cause de cela. Car nos outils ont changé, mais nos cerveaux sont toujours les mêmes, malgré ce que pensent la plupart des gens, et nous sommes en résumé très mauvais quand nous faisons du multitâche.

Que faire ? La réponse à cette question est très simple selon Chris : s’éloigner du téléphone, de l’e-mail et des médias sociaux pendant au moins 45 minutes. Sortir et marcher, respirer un peu d’air frais, prendre du recul et réfléchir.

En résumé, il y a un paradoxe intéressant ici : plus l’information circule librement, plus on a besoin de penser lentement pour être capable de créer, imaginer et « rassembler les pièces du puzzle » pour reprendre ses mots.

Productivité et rapidité

« Festina Lente » était la devise d’Auguste (Se hâter lentement) et cependant, l’empereur romain qui est arrivé au pouvoir 23 ans avant la naissance du Christ, n’aurait certainement jamais eu l’idée de ce que le digital réservait à notre civilisation. D’ailleurs, j’aimerais vraiment être capable de remonter dans le temps et de lui demander ce qu’il pense de notre façon de traiter l’information. Serait-il impressionné, étonné ou interloqué ou tout simplement horrifié ? Ceci n’est pas une question aussi simple qu’il y paraît.

Too fast to think

Cette superbe photo de la statue d’Auguste à Orange est l’œuvre de Deke McClelland. Allez visiter son site !

A-t-on besoin du digital pour être distrait ?

Cependant, je me pose la question de savoir si la distraction a vraiment besoin du digital pour exister. Je suis plutôt du genre rêveur, il m’arrive souvent de marcher un livre dans les mains sans forcément faire très attention à ce qui se passe autour de moi, perdu dans mes pensées. Cela m’a joué quelques tours, mais on ne me changera plus pour maintenant. Il est certain que le livre que j’aurai dans les mains aujourd’hui sera un e-book. Je vous l’accorde. Pourtant, les choses ne sont pas si différentes de ce qu’elles étaient il y a 30 ans quand je me baladais dans les rues de Paris ou de Londres, perdu dans mes pensées ou dans les volumes sans fin des nouvelles de Somerset Maugham.

Mes idées ne viennent pas seulement quand je suis seul ou au calme. En fait, cela arrive mais pas toujours. Au contraire, les meilleures idées que j’aie eues aient été conçues dans le brouhaha d’un pub ou d’un café. Et plus il était fort et mieux c’était (j’ai corrigé notre dernier livre dans un café, en relisant la totalité des 300 pages et en les corrigeant, dans le bruit absolu. Au calme, ma productivité est 10 fois moindre). Ou en parlant à des amis ou des collègues, en regardant des films, en prenant le train ou en écoutant, généralement assez fort, de la musique baroque.

Ainsi je me sens un peu divisé sur cette question et je ne serais pas tellement surpris si les idées venaient en effet d’un nombre incalculable de façons. La distraction étant l’une d’entre elles. Et la distraction digitale n’est peut-être ni pire ni meilleure que n’importe quel type de distraction. Il se peut qu’elle soit moins polie et plus intrusive lorsque les gens décident d’utiliser leur téléphone en partageant un repas avec d’autres personnes par exemple. Cela peut être en effet très dommageable pour leur vie sentimentale ou sociale mais cela veut-il dire que c’est mauvais pour la personne elle-même ? Je ne sais pas.

Là où je suis tout à fait d’accord, c’est sur le besoin de rester loin du téléphone, parfois, et toujours de l’e-mail. Car je pense que l’e-mail est probablement la pire chose qui puisse nous arriver à cause de la longueur de ses messages. (En cela je pense que c’est pire que les médias sociaux). Car ce ne sont pas seulement les notifications qui sont génératrices de distraction, c’est surtout que chaque e-mail amène son lot de choses à faire et de tracas (voire de stress). Personnellement, je ne ferme pas l’e-mail pendant 45 minutes de temps en temps. C’est même l’inverse : de temps en temps j’ouvre mon mail je le lis et je trie tous les messages possibles, en prenant des notes des actions requises. Ensuite je ferme mon client e-mail et je passe aux tâches quotidiennes, une à la fois.

Étrangement, avec le volume de mails que je reçois, en procédant ainsi non seulement je ne réponds pas moins vite mais je réponds plus vite. Bien souvent d’ailleurs je ne réponds pas du tout, je décroche mon téléphone ce qui est encore plus efficace.

En fin de compte, ce qui importe le plus n’est pas l’outil, mais le choix du bon outil.

Lisez Too Fast to Think de Chris Lewis

et n’ayez pas peur de penser trop vite lorsque vous décidez d’acheter ce livre chez Amazon (ou n’importe quel libraire, c’est votre choix). Acheter un livre écrit par un excentrique britannique pur jus qui s’appelle lui-même le « Grand Enchilada » ou même « Grand Burrito » (il faudra que vous écoutiez l’interview pour comprendre cette énigme digne de Pierre Dac) et parle de la nécessité d’utiliser la pensée métaphorique pour être heureux vous reposera de l’insupportable Novlangue qui conditionne le discours de l’entreprise d’aujourd’hui. On devrait même demander le remboursement du livre par la sécurité sociale.

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Pour un résumé rapide du livre Too Fast To Think, voir le blog : Greatest Hits Blog

Yann Gourvennec
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Yann Gourvennec

Yann Gourvennec created visionarymarketing.com in 1996. He is a speaker and author of 6 books. In 2014 he went from intrapreneur to entrepreneur, when he created his digital marketing agency. ———————————————————— Yann Gourvennec a créé visionarymarketing.com en 1996. Il est conférencier et auteur de 6 livres. En 2014, il est passé d'intrapreneur à entrepreneur en créant son agence de marketing numérique. More »
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