économie et numérique

Télécoms et Internet : le très haut débit sera incontournable

Le très haut débit est encore exceptionnel aujourd’hui, mais il deviendra vite incontournable. Coup de projecteur sur un aspect méconnu, et pourtant fondamental, de l’équipement d’un réseau avec un de ses acteurs au quotidien

Télécoms et Internet : le très haut débit sera incontournable

Télécoms et Internet : le très haut débit sera incontournable
Télécoms et Internet : le très haut débit sera incontournable

Bruno Janet est un pionnier de la communication car il fut, au début des années 80, le premier porte-parole d’entreprise en France. Directeur des relations avec la presse en 1985 pour ce qui ne devint véritablement France Telecom qu’en 1990, il a conseillé tous les présidents de l’opérateur historique depuis le début. Mais tout ceci est du passé, or Bruno est passionné par l’avenir, qu’il contribue à construire avec ses équipes et ses partenaires des collectivités locales. Cet enthousiasme (visible au travers de son compte Twitter, très suivi par ses partenaires : @bruno_janet) que j’ai découvert pour ma part lors d’un débat du smartwipclub – le club des professionnels des télécoms animé par notre confrère, le journaliste Eric Montagne – et qui m’a donné l’idée d’interviewer Bruno afin qu’il nous explique son métier ainsi que le futur des télécoms et leur impact sur les usages de l’Internet ; ce qu’il a fait avec beaucoup de franchise et sans langue de bois !

2003 : combler le retard …

Car les débuts furent laborieux, selon Bruno : « Au début des années 2000, tout était en retard ! » nous explique-t-il. « Les tensions entre les partenaires pour la mise en œuvre du haut débit étaient à leur comble », et c’est ce qui faisait les difficultés de l’équipement de la France cette époque.

« Avec l’arrivée de Thierry Breton en 2003 2004, nous avons démarré le très haut débit pour tous, avec un investissement de 1 milliard d’euros qui fut une réussite » a poursuivi Bruno en rappelant cette période qui a permis effectivement, à l’exception de « quelques zones blanches », d’équiper non pas « 100 % des foyers, mais 100 % des centraux téléphoniques ».

Ce n’était certes pas parfait, mais cet effort significatif fut un élément fondamental de compétitivité non seulement pour l’opérateur, mais surtout pour la France et ses entreprises. Pour ceux qui en douteraient encore, je rappelle cette statistique citée par Lynette Webb qui montrait qu’en 2006, un tiers des utilisateurs de la télé sur Ip dans le monde était français !

366061416_df9913f1d1

2005-2007 : les 40% restants …

Mais il fallait aller plus loin. La couverture de l’ADSL est passée de 60 % des foyers en 2004 à 98 % en 2007, « c’était un pari tenu » ajoute Bruno, mais il restait encore des zones d’ombre. « C’est là qu’une nouvelle loi a permis aux collectivités locales d’investir dans les réseaux » et même si Bruno admet qu’il a fallu à l’époque surmonter une certaine « frilosité » il faut reconnaître que c’est le début de l’articulation d’une stratégie de complémentarité avec les collectivités locales qui a permis de partager les investissements et de faire la guerre à ce qui dans le jargon s’appelle les « NRA zones d’ombre » (NRA zones d’ombres, c’est le terme des pros du métier pour les « nœuds de raccordement abonnés » non couverts). Avec cette nouvelle loi, c’est la possibilité de constituer des « réseaux d’initiative publique » (RIP) pour lesquels ce sont les collectivités locales qui lancent le projet, qui choisissent une « délégation de service public » (DSP) ou un partenariat public privé (PPP).

un changement radical …

Dans le cadre de cette loi, au bout de 10, 15 ou 20 ans, c’est la collectivité locale qui devient alors propriétaire du réseau. C’était un « changement fort » a ajouté Bruno Janet, « car cela signifiait que le réseau ne serait plus à nous à terme ». Cette nouvelle loi a permis de travailler en étroite collaboration avec un grand nombre de collectivités locales dont notamment la Corse, l’Auvergne, le Languedoc-Roussillon, la Somme et « ces milliers de NRA zones d’ombre sur l’ensemble du territoire ». Ceci a constitué un changement radical pour l’opérateur et aussi pour l’aménagement du territoire.

Toutefois, les limites de l’ADSL ne sont pas seulement dues à sa couverture, mais également à son caractère asymétrique (le débit montant et le débit descendant ne sont pas le même), et à sa limitation en puissance (en fonction de la distance au « nœud de raccordement »).

très haut débit : premiers résultats …

C’est ainsi que nous en arrivons au nouveau plan qui se déroule depuis quelques années, et pour lequel un « véritable élan a été créé depuis 2011 ». Il s’agit du plan fibre, démarré dès 2010, et pour lequel France Télécom Orange, en co-financement avec les autres opérateurs du marché, s’est engagé à couvrir 100 % des logements en France. Reste donc à 40 % de zones d’ombre du futur très haut débit, pour lequel le même mécanisme que celui de 2005 sera appliqué : « Il y a des gens qui trouvent que ça ne va pas assez vite » précise Bruno Janet, mais il préfère se focaliser sur les efforts mis en place et les premiers résultats : « En 1 an, les élus se sont rendu compte que l’opérateur avait une vraie volonté industrielle » à ajouté Bruno qui insiste sur le facteur fondamental de cette alliance/partenariat entre les opérateurs et les puissances publiques.

un facteur de compétitivité …

C’est tout d’abord un facteur d’attractivité pour le territoire insiste le Bruno Janet : « les entreprises ou les particuliers qui s’installent demandent le très haut débit ! C’est une valorisation du patrimoine et un critère de choix pour l’immobilier ». On le sait, le développement massif du télétravail, même en France où traditionnellement celui-ci était en retard (voir mes divers travaux sur ce sujet sur mon blog personnel) est un élément indéniable de dynamisme du réseau à très haut débit.

D’autre part, les usages explosent avec le très haut débit. Bruno compare l’ADSL « à une autoroute à 2 voies, mais l’autoroute va être de plus en plus encombrée » précise-t-il. Les usages du très haut débit sont donc un peu une affaire d’ « œuf et de poule », car avec l’arrivée d’un débit très élevé, de nouveaux usages vont apparaître, qui n’étaient même pas pensables auparavant.

la réalité sur la situation internationale …

D’une part il y a toujours des pays en avance, comme la Corée et le Japon (« à cause des décisions politiques volontaristes » précise Bruno), et d’autre part il y a les autres pays. La Suède avait pris énormément d’avance sur le très haut débit en Europe, mais le problème de la France est « la dispersion sur le territoire » ce que Bruno appelle « l’éparsité » c’est-à-dire un mélange d’éparpillement et de densité. Et Bruno Janet de préciser que nous (la France) sommes « dans la course » et que cela est confirmé par le classement de l’idate (voir également la note en bas d’article).

Quels délais ?

« 60 % des logements seront équipés d’ici 2020 promet Bruno Janet, avec 40 % restants pour les réseaux d’initiatives publiques qui seront réalisées concomitamment ». Le travail a déjà commencé en dehors de la Capitale, avec quelques exemples comme celui de Laval ou de Palaiseau-Saclay où le cœur de réseau est fait par Orange et le reste est réalisé par l’agglomération via une délégation de service public.

Mais il s’agit en fin de compte d’un véritable enjeu industriel pour le pays ; lorsqu’on cherchera un logement ou un local pour son entreprise, le très haut débit deviendra incontournable et se transformera en véritable argument de vente comme – il fut un temps – le gaz à tous les étages.

note : on remarquera en toute transparence que des voix discordantes se font entendre ici et mais que cela ne met pas véritablement en cause le déploiement de l’infrastructure en tant que tel. Si l’article du Nouvel Observateur notamment souligne les difficultés du modèle de coopération, les causes du retard en question sont peut-être à chercher ailleurs, et notamment dans les critères d’adoption des technologies et les facteurs sociologiques et économiques. Ceci à mon avis ne venant pas contredire le propos, car l’usage de la fibre se révèle avec la maturité des utilisateurs, et on sait que les technologies mettent toujours 10 à 15 ans à s’imposer au plus grand nombre ; près de 700000 abonnés au très haut débit étant d’ailleurs loin d’être un chiffre négligeable.

Yann Gourvennec
Follow me

Yann Gourvennec

Yann Gourvennec created visionarymarketing.com in 1996. He is a speaker and author of 6 books. In 2014 he went from intrapreneur to entrepreneur, when he created his digital marketing agency. ———————————————————— Yann Gourvennec a créé visionarymarketing.com en 1996. Il est conférencier et auteur de 6 livres. En 2014, il est passé d'intrapreneur à entrepreneur en créant son agence de marketing numérique. More »

Un commentaire

  1. Je ne peux m’empêcher d’établir une analogie avec le plan câble de 1986, qui lui, semble avoir été un échec (FT Cable vendu a Numericable en 2006). Renomme « Fibre », c’est un succès! Il me semble que les deux réseaux ne soient pas si différents techniquement.
    Un problème de vision marketing a long terme avec le câble ou trop de contraintes techniques?

    1. je pense que cette question devrait être posée à Bruno car je ne connais pas le plan câble. IL faut souligner que dans beaucoup de pays c’est le câble justement qui est leader (Comcast aux US, BskyB en Angleterre …). En France c’est l’ADSL qui s’est développé, ceci explique sans doute celà, entre 2005 et 2006 il n’y a qu’un pas. je vous suggère d’interpeler Bruno ( http://twitter.com/bruno_janet ) pour de plus amples explications

Bouton retour en haut de la page