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le ciblage comportemental est-il une panacée marketing ?

le ciblage comportemental est il une panacée

Un étudiant de l’école supérieure de gestion m’a consulté sur quelques points de CRM, les questions me semblant très pertinentes, je décide donc d’y répondre sur ce blog. A noter que je réponds ici non d’un point de vue académique, en me livrant à une analyse précise et documentée des deux techniques principales de ciblage comportemental, mais plus dans la position de l’annonceur et du praticien confronté à des problématiques de publicité, en ligne notamment.

le ciblage comportemental est il une panacée
le ciblage comportemental est il une panacée ?

Q1 : la montée en puissance du ciblage comportemental : est-ce une simple évolution technologique ou un impératif pour les marques ?

Le ciblage comportemental en soi n’est pas véritablement nouveau. Le premier à mon avis avoir véritablement mis en place ce type de solution (même si stricto sensu on ne peut pas appeler ça du ciblage comportemental) c’est Amazon qui grâce à un son système d’analyse des profils et des visites permet d’affiner l’autopromotion au travers de 2 principes directeurs : d’une part la « page à votre image » et d’autre part la boutique personnalisée alias « chez vous« . Ceci est opérationnel depuis plus de 10 ans. D’une certaine manière également on peut considérer le succès de Google Adwords en comme étant du ciblage comportemental, même si c’est très basique puisqu’il se base sur les mots clés qui sont inclus dans les pages visitées par les internautes afin de proposer des publicités en liaison avec ces mots-clés, mais le système est tellement efficace qu’il méritait d’être signalé même si on ne peut pas appeler cela du ciblage comportemental. Le véritable critère est, en fait, la pertinence, c’est plus important que la prouesse technologique (Epsilon a déjà relevé ce point dans l’e-mailing). Est-ce une simple évolution technologique ou un réel impératif pour les marques ? Il s’agirait plutôt de la rencontre des 2 phénomènes avec la volonté sans cesse croissante, de la part des annonceurs, d’avoir de la publicité qui soit efficace et qui permette un maximum de rendement avec un minimum de budget (surtout en temps de crise). D’une certaine manière cela est un peu illusoire cependant. On sait que la publicité connaît beaucoup de limites, les taux des bannières s’effondrent, les taux de clic par mail sont en chute libre, et les méthodes traditionnelles ne donnent pas vraiment de résultats satisfaisants et sont très coûteuses. Il y a un effet de saturation évident que ce soit sur Internet ou ailleurs, trop de pub tue la pub. Sur Internet cela se traduit par le fait que les internautes ne voient pas/plus les bannières par exemple. Faut-il en déduire que ces limites de la publicité annoncent la fin de la publicité ? Je ne le pense pas. Les méthodes d’affiliation, en B2B notamment, sont simples et efficaces et permettent d’améliorer les rendements publicitaires, si l’on recherche la rentabilité à tout prix, c’est vers cela qu’il faut s’orienter. Le ciblage comportemental également … jusqu’à un certain point. Les essais que j’ai pu faire autour de Facebook ne m’ont pas véritablement convaincu, mais il est vrai que Facebook n’est pas encore mur pour le b2b car il est interdit en entreprise. La limite également de ce genre de choses c’est qu’on tombe toujours dans le travers de l’apport de visites simples. Le véritable objectif d’une stratégie Internet, et surtout dans les social media, c’est d’aller au-delà de la simple visite et d’aller dans l’interaction avec l’individu et avec l’internaute. Tout cela va mettre du temps à se trouver, les experts de l’affiliation et de la publicité offrent naturellement des offres de ciblage comportemental pour améliorer les rendements, nous les utilisons, c’est une plus un moyen qu’une fin en soi.

à lire : ce panorama de la pub en temps de crise par l’EBG

Q2 : l’internaute est aujourd’hui au centre de la stratégie Internet : cette réalité a un impact conséquent auprès des marques. Quel est votre avis à ce sujet ?

L’internaute a toujours été au centre de la stratégie de l’Internet. Il serait illusoire de croire que l’Internet s’est bâti par les marques. Le phénomène a toujours été inverse. De même pour les médias sociaux, les marques essaient de rattraper le mouvement (on peut se poser la question de savoir si un jour elles ne génèreront pas de la saturation également) mais le mouvement est bien né des internautes. Le coeur de l’Internet c’est bien le contenu généré par les utilisateurs (UGC). La différence depuis plus de six ou sept ans c’est que l’internaute peut s’exprimer beaucoup plus librement que par le passé. Sans ce véritable apport de la technologie et des technologies matures des sites collaboratifs (les blogs en tête, les réseaux sociaux etc.) le phénomène était beaucoup plus discret. Pour les marques, cela suscite beaucoup d’intérêt, mais aussi beaucoup d’inquiétudes (notammement de la peur de ne plus contrôler sa communication ; la peur n’évite pas le danger !), une difficulté énorme à mesurer en quantité et en qualité les buzz, positifs ou négatifs, mais la nécessité aussi de s’impliquer (ce n’est pas là que les marques sont les meilleures), et d’aller au-delà du média social pour intégrer de l’interaction dans tous les éléments de la marque : le CRM, l’engagement clients, la promesse clients, l’expérience offerte à ces clients. Le social media et les médias sociaux en général ne remplaceront pas le CRM, c’est une illusion et ce n’est même pas souhaitable. Pour ce qui est de la co-création, c’est un sujet déjà banal en B2B, mais qui se pratique depuis des années en dehors de l’Internet, et où l’Internet commence à prendre une place, assez timide soyons clair. En B2C, malgré quelques expériences intéressantes et parfois éphémères (expérience Liebig avec sa soupe de Tatiana, un exercice un peu spécieux et un peu ancien), ce phénomène reste marginal aujourd’hui et on peut le déplorer. Encore une fois, ceci mettra beaucoup de temps à s’instaurer, il faut toujours compter 10 à 15 ans pour une révolution technologique s’imprime définitivement dans les moeurs du plus grand nombre.

Q3 : le marketing one to one est-il réalité ? Est-il réellement atteint ?

Il s’agit d’un terme aujourd’hui tombé en désuétude. On le doit essentiellement à un marketeur américain qui s’appelle Don Peppers (voir http://www.1to1media.com/), et dont l’activité est très nettement tombée après la bulle. Je pense qu’il y a eu un excès de surf sur sa terminologie, et aussi il y a une contradiction dans les termes. Le marketing ne peut pas être individuel. On ne peut pas construire, sauf dans de rares exceptions, de produits uniques ne peut donner une illusion de l’unicité, mais assure transmettre finit par décevoir. Il s’agit donc plus proprement parler d’un rêve de marketeur, qui se transforme d’ailleurs souvent en cauchemar pour les fabricants, même s’il y a des exemples rares et réussis en ligne, on a cité souvent les chaussures de sport (Nike par exemple). Je pense que la plupart des marques ont encore des soucis avec leur approche CRM, en essayant de rajouter toute une flopée de béquilles technologiques, mais que le principal travail sur lequel elles devraient se pencher est la relation client (pas ses outils). La première personnalisation c’est dans le contact avec l’utilisateur, le client et la réponse à ses questions de manière aimable, engageante, sympathique et prévenante. En France, nous en avons discuté dans le comptoir des blogueurs de cherclient.com (CRM: les erreurs à ne pas commettre), nous sommes plus que très en retard à ce sujet.

Q4 : quelles évolutions futures permettront d’atteindre ce modèle ?

Je confirme ce que j’ai dit ci-dessus, cela va prendre du temps, et l’objectif n’est pas le one to one, mais une relation de qualité avec le client, le marketing personnalisé ça passe essentiellement par des personnes.

Q5 : pensez-vous qu’il sera un jour possible pour un compromis entre annonceurs et internautes afin de concilier pertinence marketing et respect de la vie privée ?

Tout d’abord il y a le cadre légal, surtout en marketing pour les consommateurs. Pour le marketing en business-to-business, on pourrait parler plus d’un cadre moral puisque le mailing par opt-out est autorisé. Ceci étant, notamment dans le cadre de la grande marque pour laquelle je travaille, travailler en opt-out est pour moi complètement impossible d’un point de vue éthique. D’autres ont beaucoup moins de scrupules, mais l’opt-out de toute façon n’a aucune efficacité. Pour plus d’efficacité je suggère l’opt-in pur sur invitation. C’est la méthode que j’utilise tout le temps ; c’est un peu plus lent mais c’est beaucoup plus efficace. On invite quelqu’un à s’inscrire mais il y a un acte d’inscription volontaire réelle de la part de l’utilisateur et une double confirmation qui s’assure que la personne s’étaie inscrite elle-même. Pour moi l’éthique, on ne peut pas transiger, c’est obligatoire, même si beaucoup de marketeurs ont tendance à oublier cela ; pour moi ce ne sont pas des gens qui honorent notre profession. Pour le ciblage comportemental, je ne vois pas pourquoi il n’en serait pas de même. Le marketing de la permission est la seule alternative sur Internet (ou ailleurs). Seth Godin se tue à le répéter depuis 15 ans, je me demande encore pourquoi cette question revient sans cesse à l’ordre du jour. Sans doute un héritage du « get rich quick » et du marketing pyramidal.

Yann Gourvennec
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Yann Gourvennec

Yann Gourvennec created visionarymarketing.com in 1996. He is a speaker and author of 6 books. In 2014 he went from intrapreneur to entrepreneur, when he created his digital marketing agency. ———————————————————— Yann Gourvennec a créé visionarymarketing.com en 1996. Il est conférencier et auteur de 6 livres. En 2014, il est passé d'intrapreneur à entrepreneur en créant son agence de marketing numérique. More »

Un commentaire

  1. La réponse est effet très académique mais je la trouve exhaustive. Il y a cependant un vrai effort a fournir de la part des acteurs du web publicitaire (et je m’inclus dedans) sur ce que l’on entend par ciblage comportemental. Est ce que, comme vous le préciser, cette terminologie inclue des leviers comme le SEM et qu’elle englobe également le retargeting ou le ciblage comportemental tel que l’entendent des acteurs comme weborama ou wunderloop (je suis un ancien de weborama).

    En effet aujourd’hui ces régies communiquent autour de technologies de ciblage comportementale propriétaires, basée soit sur l’analyse lexicale des sites, soit sur le parcours des internautes, etc… finalement aujourd’hui cette dénomination est un peu fourre-tout dans la pratique et je trouve cela dommage alors que l’on pourrait peut être clairement les identifier et les normer…ca permettrait peut être de conduire des études sur les couts d’acquisitions constatés par levier, etc..

    1. parfaitement d’accord, c’est bien mon point, je suis partisan d’une définition large où l’objet prend plus d’importance que la technologie qui sert à l’atteindre.

  2. Bonjour,
    Votre article est très intéressant.
    Vous ne mentionnez pas le ciblage comportemental liés aux serveurs de bannières publicitaires comme Criteo ou en marque blanche Wunderloop. Bien qu’il s’agisse simplement d’outils au service du marketing sur Internet, quel est votre avis sur l’utilisation de ces outils sur des problématiques de ventes et/ou de collecte d’adresses e-mail via des message scénarisés?

    1. Nous les utilisons et même, je peux dire que mes campagnes de bannières se resserrent essentiellement sur ces méthodes qui sont plus efficaces. Ceci étant, nous observons tous – confirmation encore avec plusieurs fournisseurs aujourd’hui – des baisses de rendements. mais moins avec cette méthode.

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